Le soleil Sénégalais commençait à peine à percer la brume matinale que déjà de l'autre côté de l'immensité de cette mer de roseaux et de marais, dans le fameux Djoudj, des milliers d'oiseaux de toutes sortes s'activaient. Des pélicans, des oies d’Égypte, des dendrocygnes, des sarcelles d'été, des bécassines et des chevaliers en grand nombre. Nous avions déjà pu faire une passée la veille au soir et les quelques oiseaux prélevés avaient fait le bonheur du cuisinier du camp et ravis nos papilles pour l'apéritif…
Mais ce matin, avec mon jeune pisteur "Ali", nous étions sur la piste des phacochères… Il était exceptionnel pour ce camp de recevoir un chasseur à l'arc et une "judo" bien placé à 20m sur une talle d'herbe sèche, rassurait le pisteur (et votre serviteur). Il ne fallait pas les décevoir. J'étrennais pour l'occasion ma nouvelle tenue "Camoléon" et dès les premiers mètres j'étais rassuré sur la couleur choisie par rapport au biotope. Celui-ci se composait de petits joncs séchés et de bouquets de tamaris tous les 30 à 50m. Point de baobab ni d’acacia, comme nous avions pu en voir tellement sur la route qui nous avait amené de Saint Louis, mais des milliers d'hectares de ce biotope, entrecoupés de marais et parfois, près des villages, avec leurs cases rondes typiques tels les cases de Tintin au Congo, des rizières, bientôt prêtent à accueillir de nouveaux semis.
Dès les premières minutes d'approche un, puis, deux, puis 3 phacochères étaient rapidement repérés. Mais les distances des animaux à 200 / 300 m ne me rassurait guère… Mon pisteur, m'expliquait dans un français quasi inexistant, que les phacochères remontaient le vent pour rejoindre leur refuge diurne. A priori, nous n'étions pas trop bien positionné mais je lui faisais confiance… 30mn plus tard et quelques phacochères de plus, toujours à de lointaines distances, mon guide casse 2 branches d'un tamaris et me demande de me positionner "là !". Un bouquet de tamaris va me servir de cache, bouquet semblable aux centaines d'autres qui m'entourent. Pourquoi celui-là plutôt qu'un autre ?? Quelques sentiers de "phacochoerus" à proximité, mais pas d'autoroute à suidés comme j'avais pu en voir précédemment…
Le vent comme je le craignais n'est pas bon et les animaux qui rentrent vont me sentir à 50m…Adieu veau, vache,…phacochère !
L'attente commence. Un coup de télémètre par ci, un coup de jumelles par-là, les minutes passent.
Soudain, mon œil est attiré par une masse grise à 50m. Un phacochère arrive de l'autre côté, seul, tranquillement et à bon vent.
Un coup de jumelles me permet de bien voir les deux belles bananes du "phaco". C'est une femelle adulte et j'ai le feu vert du responsable du camp si elle n'est pas suitée…
20 m me sépare d'un petit passage entre deux tamaris. Le "sanglier des savanes" l'emprunte et s'arrête à 20m, de profil, en plein découvert. Une véritable cible 3D ! Très rapidement mon arc est armé et je ne cesse de penser à "la patte, la patte, la patte"… Ayant bien étudié sur des dessins la morphologie de l'animal convoité, je savais le cœur, juste au-dessus de l'axe de la patte avant. Mon pin se positionne presque tout naturellement sur cette cible. Le bras d'arc bien ferme, j'appuie sur la détente.
"Mon" phaco, part au grand galop pendant 5-7 secondes. Cela me laisse le temps de reprendre mes jumelles, de le suivre et bien voir distinctement une belle tache rouge au-dessus de la patte avant. A 100-120 m un grand "crac" dans un bouquet de tamaris me rassure.
Ali, dont c'était le premier guidage à l'arc, n'a rien manqué de la scène… Il veut y aller tout de suite. Pas question. Même si je suis confiant, j'attends les 15mn "réglementaires". Au bout de cette "éternité" je l'invite à suivre la piste du sang pour rejoindre l'animal (un peu de formation et de pédagogie ne vont pas de mal)… 2mn plus tard, je découvre couché sur le flanc, mon premier animal africain.
L'autopsie, faite dans les règles de l'art avec mes compagnons de séjour, confirmera une belle flèche de cœur et le travail parfait de la lame Ramcat…
Une "belle et bonne flèche" que je souhaite à tous les archers !
Philippe L.
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