Ce grand frêne conviendra bien, j’en suis sûr. Quelques coups de pied pour tasser ci et là ronces et branches me gênant pour caler mon échelle à emboitement , sangle à cliquet opérationnelle , marche supplémentaire pour accrocher mon sac à dos et mon carquois , il est 17h30 et je suis en place, en cette belle journée printanière précoce, pour débuter le dernier affût de ma saison . Année peu palpitante en réussite, un peu de poil de renard en début de saison collé sur ma flèche avec son propriétaire assis à côté de celle-ci en train de se demander qu’est-ce qui l’avait chatouillé (çà paye, je vous jure ), puis plus de rencontre ou trop loin ou trop à la course ou pas au plan de chasse…
Pourtant c’est toujours avec le même bonheur que le week-end arrive avec son cortège de préparatifs et d’espoirs et puis quoi de mieux qu’être perché le dos plaqué sur une bonne écorce rugueuse, noyé dans ses pensées et sa méditation même si seul un écureuil vient vous distraire à 2 m sans vous voir (n’est-ce pas Christophe ?)
La veille au cours de la dernière chasse collective, mon copain président de chasse me dit :
« Puisque 6 bracelets n’ont pas été fermés je t’en donne 1 à faire à l’affût d’ici la fermeture »
C’est ainsi que je me retrouve devant cette parcelle en régénération de prunelliers et ronciers impénétrables dans laquelle les chiens ont l’habitude de nous sortir renards et chevreuils.
De nombreuses coulées convergent devant moi et comme toujours j’y crois dur comme fer !!! 18h, un ragondin passe et repasse sur la petite rivière tumultueuse de 5m de large qui coule derrière moi. Pas moyen de le saluer à travers les branches … 18h30 le soleil décline lentement à l’horizon 18h50 plouf au pied de l’échelle, il me nargue et il commence à faire sombre …soudain mon regard est attiré à 300m plein ouest de l’autre côté de la rivière dans cette grande pâture : une chevrette, d’un pas déterminé, se dirige droit sur moi tout en s’accordant grignotage et mise en bouche. « Dépêche-toi, il va bientôt faire trop nuit pour moi !!! »
Elle arrive enfin à la rivière, je ne vais tout de même pas tirer de l’autre côté…et pourquoi pas après tout…Je ne la vois plus, cachée derrière un buisson, ah c’est elle qui entre dans ma percée mais il fait trop sombre et il n’y a plus assez de contraste. « Allez, avance encore un peu à droite dans cette partie claire ….parfait maintenant je te vois et c’est à moi de jouer : la flèche est partie et j’entends un POC caractéristique. La chevrette démarre à fond et je discerne une course en zigzag et la nuit tombe comme une chape…
Comme un idiot j’ai oublié ma torche blanche pour contrôler mon tir et voir s’il y a du sang ! Un petit coup de fil et les copains sont là le temps de replier tout mon matériel.
En 4x4 nous franchissons le pont et pénétrons dans la pâture jusqu’à mon impact : pas de flèche, pas de sang, aucun indice…Pour en avoir le cœur net Philippe fait intervenir son teckel pourtant aguerri : celui-ci suit la rivière mais ne prend pas la voie…le doute s’installe…
Jean-Louis ( l’autre ) saute dans son 4x4 et roule alors plein phares en direction de la fuite présumée pour s’arrêter soudain à 120m de mon tir, descendre et nous crier : « cherchez plus les gars, elle est là . » Ma chevrette gît sur le côté droit, la flèche sortant de 20cms de son omoplate gauche. A la dépouille le tir s’avère être parfait ¾ arrière droit, côte cassée à l’entrée, 2 poumons, côte cassée et omoplate transpercée à la sortie et hémorragie interne massive. Et pourtant une centaine de mètres de course, une flèche de part en part et aucun indice au sol !!!
Si je peux me permettre une réflexion : soyez obstiné en patience mais aussi dans votre recherche. La chasse à l’arc me fait vivre mes plus belles émotions.
Arawak 60 livres, flèche Easton alu, bilame Magnus, tir 12m ¾ arrière
Cordialement Jean-Louis D.
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